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Mary Higgins Clark, écrivain de mère en fille

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© Parismatch.com
Benoît Leprince

Interview. Son 40e roman, écrit avec Carol, son aînée, vient de paraître. Rencontre avec la reine du best-seller, cinq fois mère et dix fois grand-mère.

Un trône pour deux. Mary Higgins Clark nous ouvre les portes de sa propriété de Saddle River, dans le New Jersey, et nous présente son «coauteur» : sa fille, Carol.

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Par Dany Jucaud/Paris Match
Photo Kasia Wandycz


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Ce n’est pas une maison, c’est un palais sur lequel les Higgins Clark entendent régner, de mère en fille. «Le mystère de Noël» est leur troisième polar écrit à quatre mains. Un chapitre seulement dans une histoire qui a tout d’une saga. En préface, naissance de la dynastie dans le Bronx, le milieu est modeste. L’enfance de Mary est marquée par la mort de son père et l’âpreté du quotidien. De quoi forger un caractère d’acier. Secrétaire puis hôtesse de l’air, Mary Higgins Clark s’accroche à l’écriture comme à une bouée de sauvetage. L’échec de son premier livre, en 1969, n’entame pas sa détermination. A raison : elle rencontre le succès au deuxième essai. Carol a alors 15 ans. Celle-ci attendra d’avoir 33 ans pour suivre l’exemple maternel, avec réussite elle aussi. Mary Higgins Clark peut songer sereinement aux dernières pages de sa vie : la suite est assurée.
Elle a vendu plus de 300 millions de livres dans le monde, mais elle n’est pas de ces auteurs qui ont besoin de solitude pour trouver l’inspiration ; dans sa maison de Saddle River, au cœur du New Jersey, Mary Higgins Clark continue à vivre entourée d’enfants. Reine du suspense, la romancière de près de 80 ans, qui nous accueille chez elle, est aussi – et surtout – une grand-mère heureuse.



Paris Match. Qu’est-ce que vous savez faire de vos dix doigts, à part écrire?
Mary Higgins Clark. Rien! A 6 ans, je rédigeais déjà des poèmes. Mon rêve, cela dit, aurait été d’être actrice. Mon père est mort quand j’avais 10 ans. Au lieu de prendre des cours d’art dramatique, j’ai dû apprendre à taper à la machine pour faire vivre ma famille...



Tout ce que vous touchez se transforme en or. C’est quoi, votre truc?
Les gens peuvent facilement s’identifier aux personnages que je décris. Mes livres parlent toujours de personnes normales dont la vie, soudain, est bouleversée. Ce n’est pas à moi de juger si je suis un grand écrivain. Disons que je suis une charmante fille catholique irlandaise du Bronx, avec un certain don pour raconter des histoires.



Est-ce qu’il y a un sujet sur lequel vous n’écrirez jamais?
L’inceste. On me demande aussi pourquoi je ne parle jamais de sexe. Ce n’est pas parce que je suis prude, mais je préfère suggérer que montrer. Nul n’est plus sexy que Rhett Butler, dans “Autant en emporte le vent”, quand il dit : “Vous ne me mettrez pas à la porte de votre chambre ce soir!”



Etes-vous consciente que beaucoup de gens détestent votre genre de littérature?
Quand un critique me démolit, je lui mets une balle dans la tête dans mon prochain roman, ainsi je n’ai aucune frustration. J’imagine que c’est une pilule dure à avaler de voir quelqu’un qui va de succès en succès, alors qu’il y a des tas d’auteurs bien meilleurs que moi dont on ne parle jamais. J’écris pour faire rêver les gens. Il y a quelques jours, une jeune femme m’a envoyé une lettre qui m’a beaucoup touchée : “Mon fils, disait-elle, est resté six semaines entre la vie et la mort. Vos livres m’ont aidée à tenir le coup. Merci!” Quand je me suis retrouvée veuve avec cinq enfants et sans un dollar en poche, le toit fuyait, ma voiture ne marchait pas... C’est la lecture qui m’a sauvée. J’avais déjà écrit quinze best-sellers quand, un jour que j’étais venue faire une conférence promotionnelle dans un collège, il y a quelques années, une très vieille dame à l’air sévère, dans une chaise roulante, m’a glissé à l’oreille : “Vous étiez une épouvantable élève en maths, miss Higgins!” Sur le coup, je ne l’avais pas reconnue. Par courtoisie, je lui ai répondu : “Que Dieu bénisse votre mémoire, révérende mère.” On ne peut pas être aimée par tout le monde.



Quel genre d’écrivain êtes-vous?
Facile et heureuse. Ça m’amuse beaucoup, ces écrivains qui disent qu’ils ne supportent pas le moindre bruit quand ils écrivent. Veuve à 35 ans avec mes enfants qui hurlaient dans la pièce d’à côté, je n’ai pas eu ce privilège. Pour avoir un peu de calme, il fallait que j’écrive entre 5 et 7 heures du matin, avant de les emmener à l’école.



Vous êtes très riche. Savez-vous exactement combien d’argent vous avez en banque?
Oui. Je suis très conservatrice dans mes investissements. J’ai des bons du Trésor et j’ai investi dans l’immobilier. Je suis une bonne femme d’affaires. J’ai appris sur le tas. Chaque année, à Noël, je donne 100 000 dollars à chacun de mes enfants. Le gouvernement prendra 70 % de ma fortune quand je serai morte, autant qu’ils en profitent tout de suite! Quand je n’avais pas d’argent, j’adorais faire du shopping, sur le chemin des grands magasins je salivais à l’idée de faire une bonne affaire. Maintenant que je peux tout m’offrir, ça ne m’intéresse plus. Cela dit, chaque fois que je finis un livre, je m’offre un beau bijou.



Quel est le premier gros cadeau que vous vous soyez fait?
C’était en 1977, quand j’ai appris qu’on me donnait 1 million de dollars pour un livre. J’ai bazardé ma vieille Oldsmobile, qui avait 140 000 kilomètres au compteur, et je me suis acheté une sublime Cadillac bleue.



Vous semblez très heureuse. Comment avez-vous rencontré votre second mari?
C’est ma fille Patty qui est à l’origine de cette rencontre. Elle m’a dit : “Maman, j’ai quelqu’un pour toi. Il est très beau, très intelligent, et veuf
depuis deux ans!” Elle l’a invité au cocktail que j’avais organisé pour la sortie d’un de mes livres. C’était en juin 1996. Dès le premier soir, il m’a dit : “Est-ce que vous accepteriez de m’épouser dans deux ans?” Je lui ai répondu : “Vous savez, à l’âge qu’on a, pourquoi perdre tout ce temps?” Six mois après, nous étions mariés. La seule chose que je lui aie dite, c’est : “Il faut choisir entre votre chien et moi. je suis allergique aux poils de chien!”



Vous allez bientôt avoir 79 ans. Vous n’avez pas envie de lever un peu le pied?
Non, il suffit d’une phrase pour enflammer mon imagination. J’ai lu récemment dans un article : “Depuis que j’ai eu une transplantation du cœur, je ne suis plus le même homme.” J’en ai fait le sujet de mon prochain roman. Je ne pourrais pas vivre sans écrire. Je suis toujours en train d’écrire dans ma tête, même si je ne suis pas à mon ordinateur. Si je pouvais travailler tous les jours de 7 heures du matin à midi, je serais capable de produire au moins douze livres par an!



Il vous arrive encore d’être étonnée de ce que vous êtes devenue?
Je ne me vois ni riche ni célèbre. je suis une survivante. Mon premier mari me disait : “Je ne me fais aucun souci pour toi, Mary. Si l’on te jetait nue dans un fleuve à Detroit, à minuit, on te retrouverait à 6 heures du matin bien habillée, bien coiffée, avec 100 dollars en poche que tu aurais gagnés honnêtement!” Un jour mon petit-fils Justin, qui avait 12 ans à l’époque, se promenait dans la maison un de mes livres à la main. Alors que je lui disais que ça me faisait très plaisir qu’il en lise un, il m’a répondu : “On nous a donné à l’école une liste d’écrivains à lire, et ton nom y était. Alors j’ai choisi ton livre, parce que c’était le plus court!”



De quoi avez-vous le plus peur dans la vie?
Que quelque chose arrive à l’un de mes enfants. Je dis toujours à Dieu dans mes prières : “Si vous faites des courses dans ma famille, prenez-moi, j’ai eu une vie sublime. Mais je vous en supplie, laissez mes enfants tranquilles.

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