Couverture fascicule

Henri Lefebvre, La révolution urbaine, Paris, Gallimard, 1970

[compte-rendu]

Année 1970 18 pp. 312-315
Fait partie d'un numéro thématique : Sociologie économie et impérialisme
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L'auteur reprend ici et amplifie k recherche commencée depuis plus de dix ans dans des textes nombreux et divers (1). Les idées d'origine se trouvent maintenant confortées, étayées : l'urbanisation est la fin de l'industrialisation, l'urbain est une totalité qui ne peut être appréhendée au moyen des sciences parcellaires, l'urbanisme est une idéologie, la conquête de l'urbain implique une stratégie urbaine qui doit combattre la stratégie de classe des pouvoirs et des institutions, etc.

Voici donc que s'ouvre un champ de réflexions et d'actions politiques. Nul doute que ce champ s'élargira et s'universalisera dans les années qui viennent. Nul doute qu'on ne pourra répondre aux questions posées ici, selon les schémas anciens et à l'aide des concepts classiques. Voici un domaine qu'on ne peut aborder avec le seul souci du quantitatif. C'est une raison de plus de suivre avec attention les travaux de Lefebvre qui mettent à jour de nouvelles pratiques, qui élaborent une nouvelle théorie.

Que dit-il dans ce dernier ouvrage ? -

L'hypothèse de départ définit par « société urbaine » la société qui résulte de l'urbanisation complète, celle qui naît de l'industrialisation. Historiquement, la ville apparaît d'abord comme ville politique, puis marchande. À un moment donné, dans le rapport ville-campagne, la ville prend la primauté, c'est la naissance de la réalité urbaine (XVIème, XVIIème siècles). Ce moment précède de peu l'apparition du capital industriel qui à son tour conquiert la ville ou qui crée d'autres villes sur les lieux d'extraction. La réalité urbaine

(1) Voir notamment Le droit à la ville et Du rural à l'urbain, Éditions Anthropos, Paris.

devient force productive, comme k science, elle modifie les rapports de production sans suffise à tes transformer. Il faut donc tendre vers une connaissance du processus global de la société urbaine, en partant de l'analyse de la zone critique actuelle, en explorant le possible qu'elle contient.

La théorie marxiste de la plus-value distingue sa formation, sa réalisation, sa répartition. La plus- value s'est formée à la campagne puis à la ville, par contre le système commercial des villes a toujours été l'organe de sa réalisation et dans sa répartition les maîtres des villes en ont toujours retenu une grande part. C'est la fonction principale de la centrante urbaine dans le mode de production capitaliste. Dans la phase critique actuelle, un problème apparaît : celui de la nature et avec lui la définition de nouvelles raretés : l'eau, la terre, la lumière, l'espace, le temps, le désir, qui remplacent dans les sociétés développées l'ancienne rareté de la nourriture. Trois champs émergent : le rural, l'industriel et l'urbain, séparés par des « champs aveugles », qui sont occultés par l'application d'anciens concepts : ainsi, on juge l'industriel avec les concepts du rural et l'urbain avec les concepts de l'industriel. Le champ industriel est dominé par un projet de rationalité généralisée : appliquer à toute activité la division manufacturière du travail. Ce projet fait le vide devant lui : dans l'espace et dans la pensée. Il tend à pousser son efficacité dans la division sociale du travail, il ne reste plus que poussières de fragments et l'impossibilité de la synthèse. Puis vient l'urbain que nous ne voyons pas encore et dans une confusion de concepts nous cherchons à appliquer à l'urbain (qui a une réalité propre comme l'industrialisation en a eu une) la rationalité de l'industriel, ce qui a nom d'urbanisme.

Le phénomène urbain se présente comme réaUté globale impliquant l'ensemble de la pratique sociale. Les sciences parcellaires ne peuvent en donner qu'une analyse fragmentaire qui ne constitue pas une connaissance. Il est tentant de faire appel à la linguistique post-saussurienne pour utiliser la méthode de la différence et celle de la signification des systèmes de signes. Peut-on l'appliquer à l'urbain dont les unités constitutives sont déjà signifiantes en elles-mêmes, contrairement aux signes des linguistes ? Le travail interdisciplinaire qui serait nécessaire a fait la preuve de son inefficacité, la synthèse ne peut être le fait d'aucun spécialiste et encore moins de praticiens, tels les architectes et les urbanistes qui le prétendent abusivement.

Les connaissances fragmentaires proviennent de la division technique du travail intellectuel et produisent une division sociale de ce travail qui se concrétise dans les institutions, appareils, hiérarchies, et cek en connexion avec la structure de cksse, les rapports de production et de propriété. Seule la philosophie, en se dépassant elle-même, peut, avec l'aide des autres connaissances, interroger le phénomène urbain. Ce dépassement de la philosophie en métaphilosophie permet non pas de construire des

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