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Libération

Neuf mois de couacs en vrac pour Raffarin : chronologie.

par SERVICE FRANCE
publié le 27 décembre 2003 à 2h28

Avril

Mode de scrutin : réforme retoquée

3 avril

Chirac, Juppé et Raffarin voulaient changer les règles du jeu pour les régionales de mars 2004, afin de «zapper» de la scène politique l'UDF de Bayrou qui commençait à faire preuve d'indiscipline. Devant le tollé (à l'exception de l'UMP) et les risques d'obstruction parlementaire, Raffarin dégaine le 49-3. Mal lui en prend. La réforme retenue décide d'instaurer un seuil de 10 % des électeurs inscrits pour se maintenir au second tour, qui n'existait pas dans le projet soumis, comme le veut la loi, au Conseil d'Etat. Le Conseil constitutionnel censure la disposition. Et juge fautif le législateur qui ne respecte pas le «pluralisme des courants d'idée».

Le voile qui déchire

19 avril

C'est Sarkozy qui met le feu aux poudres lors de l'assemblée générale de l'UOIF, en rappelant que la loi impose que, «sur la photo de la carte d'identité, le titulaire soit tête nue, homme ou femme». Le débat autour du voile est relancé. Faut-il légiférer pour interdire les signes religieux à l'école ? Jusqu'en décembre, le ministre de l'Intérieur s'y déclare hostile. Raffarin est plutôt pour, Ferry, «à titre personnel», contre. Fillon, le ministre des Affaires sociales, toujours content de prendre le contre-pied de Sarkozy, est favorable à une législation, comme il le rappelle devant la commission Stasi. Au final, c'est Chirac qui tranche en décembre : il y aura une loi qui interdira les signes religieux «ostensibles» à l'école. Ferry se dit «très fier» de rédiger la loi. Il répète quand même qu'il préfère le terme «ostentatoire», contre l'avis de Chirac.

Décentralisation dans tous les sens

24 avril

Après avoir critiqué l'«intégrisme décentralisateur» du Premier ministre fin 2002, Debré met en cause l'ensemble de sa politique. Dans une note, il alerte Chirac et Raffarin sur la «catastrophique» situation économique et sociale du pays et leur demande «plus de lisibilité» dans l'action ministérielle. Cette note se retrouve dans la presse. Bien sûr, «c'est pour aider le gouvernement et contribuer à la réussite de sa politique», jure le président de l'Assemblée. Quelques jours plus tard, Raffarin s'affirme comme le seul capitaine : «Je maintiendrai le cap et je le ferai à mon rythme.» Non, mais !

28 avril

Alors qu'on lui demande pourquoi il a affirmé que les personnels de l'Education ne seraient jamais décentralisés, Ferry répond : «Je n'ai jamais dit ça. Mes directeurs peut-être, mais moi, jamais. Les journaux ont écrit des bêtises.» En début d'année, alors qu'il ne cessait de répéter qu'il n'était pas «demandeur» d'une réforme de la décentralisation, il avait dû manger son chapeau lorsque Raffarin avait annoncé le contraire : «Le gouvernement a décidé, j'y souscris à 100 % car c'est moi qui ai proposé ces mesures.» Bel exercice de haute voltige.

Mai

L'Education dans le flou

22 mai

Ah, Ferry-Darcos ! Tout un poème. En voyage au Canada, l'entourage de Raffarin se désole d'un «cafouillage de plus d'un couple [Ferry-Darcos] qui n'a jamais fonctionné».

Motif : le ministre de l'Enseignement scolaire a indiqué que les transferts de personnels dans le cadre de la décentralisation pourraient être repoussés à «septembre 2005». Quelques heures plus tard, le ministre de l'Education nationale le dément : «Xavier Darcos a rappelé le calendrier qui est prévu depuis toujours. Arrêtez de faire des histoires !», lance-t-il à des journalistes. Puis, pour être plus clair encore : «Il n'y a pas d'étalement du calendrier.» De fait, le recul de Darcos n'en était pas un (le gouvernement ne pouvait pas aller plus vite), mais il permettait d'ouvrir un espace de négociation. Raté.

Juin

Dérapage sur le PS

10 juin

Distorsion d'image. Il se voulait consensuel et rassurant, il se révèle cassant et peu tolérant. En plein débat sur les retraites, Raffarin lors d'un meeting UMP se lâche. Les socialistes ? «Ils préfèrent leur parti à leur patrie !» Au plus haut dans les sondages, on ne s'arrête plus. Trois semaines plus tard, il remet le couvert. Sa cible ? Toujours les socialistes mais aussi les communistes. «La France n'est encore, dans son chemin du paradis, qu'au purgatoire puisqu'il reste des socialistes.» A Strasbourg, devant un parterre tout acquis d'eurodéputés conservateurs, il explicite ses propos : «Le Premier ministre slovaque m'expliquait tout à l'heure qu'il n'y avait que deux destinations pour le socialisme : le paradis, mais c'était déjà fait, et l'enfer où là, ma foi, il était déjà arrivé.» Ce n'est pas sa première sortie de route. Le 14 janvier, lors des voeux à sa majorité, à huis clos, il joue au bowling avec des quilles de gauche. «J'aime bien quand l'opposition est comme ça, divisée : les jeunes gauchos, les faux libéraux, les archéos. [...] Plus ils resteront comme ça, sans projet et sans chef, plus nous pourrons avancer avec détermination.» Une «raffarinade» ?

Intermittents, le bide

27 juin

Erreur de calendrier. Le 27, les patrons et trois syndicats du spectacle minoritaires signent un protocole d'accord modifiant le système d'indemnisation des intermittents. C'est aussitôt la mobilisation : voyant leur statut remis en cause, les intermittents occupent théâtres et journaux, défilent, menacent les festivals dont la saison commence. Jean-Jacques Aillagon, qui n'a pas conduit les négociations, sera montré du doigt : il a réactivé cette bombe à retardement au moment où se profile l'été des festivals. Le 7 juillet, il annonce en catastrophe un «plan de sortie de crise». Las, il n'y a rien dedans: la mobilisation redouble, Avignon est annulé le 10, le festival d'art lyrique d'Aix dans la foulée, et Raffarin est furieux. Aillagon se dit «partagé entre la tristesse et la révolte», sa tête branle, mais il reste en place car chiraquien de longue date.

Juillet

L'ISF qui tombe mal

22 juillet

Le Parlement adopte définitivement la loi Dutreil sur «l'initiative économique». En fait, elle a servi de support à une réforme de l'impôt sur la fortune (ISF), grâce à de nombreux allégements fiscaux pour les contribuables qui investissent dans les entreprises. Le gouvernement s'est laissé faire une douce violence par sa majorité : alors que le Premier ministre se déclarait le 28 janvier «pas favorable à une réforme de l'ISF», Renaud Dutreil, ministre des PME acceptait une semaine plus tard les amendements proposés par les libéraux et allait même jusqu'à déposer les siens. Manque de chance, le 4 février, alors que s'ouvrait le débat à l'Assemblée, on apprenait la fermeture de l'usine Metaleurop, dans le Pas-de-Calais. Dirigée pas un «patron voyou»...

L'embrouille colombienne

25 juillet

Embrouillamini au sommet. Une équipe de la DGSE est envoyée en Colombie pour tenter, à la demande de Dominique de Villepin, de libérer la franco-colombienne Ingrid Betancourt, ancienne candidate à la présidentielle, otage de la guérilla de son pays. Alors qu'il visite le Pacifique sud, Jacques Chirac est interrogé en Nouvelle-Calédonie, sur une éventuelle implication des barbouzes françaises. Sans se démonter, il affirme que c'est «sans doute une rumeur, une fausse information. Si une telle opération avait été envisagée, j'aurais été naturellement au courant». Manque de chance, quelques heures plus tard, Jean-Pierre Raffarin, en voyage au Maroc, indique que l'opération a «été prise en toute transparence entre les différentes autorités de l'Etat, au plus haut niveau» et «dans la confidentialité que ce genre de mission impose». Ça fait désordre. Alors, l'Elysée confirme aussitôt que «le président de la République avait été informé et avait donné son accord de principe». Bien entendu. Cette méchante querelle intervient sur fond de rivalité entre Nicolas Sarkozy et Dominique de Villepin. Car, ignorant tout de l'affaire, le ministre de l'Intérieur, justement en visite à Bogota, se retrouve dans le rôle de pacificateur face à des Colombiens ulcérés d'avoir été tenus dans le secret. Défense du Quai d'Orsay : ceux qui n'avaient rien «à connaître de cette affaire» n'ont pas été informés. Bilan : deux couacs pour un dossier.

Août

Pour la canicule, ils les accumulent

10 août

C'est le gros bug de l'été. Au final, une surmortalité de 15 000 personnes. En cause : une canicule exceptionnelle, notamment à Paris. Ce 10 août, Patrick Pelloux, président de l'Association des médecins urgentistes hospitaliers d'Ile-de-France, évoque une «hécatombe» avec «une cinquantaine de morts en quatre jours en région parisienne». Le lendemain, le cabinet de Jean-François Mattei, le ministre de la Santé, répond par un communiqué lénifiant : «Les difficultés rencontrées sont comparables aux années antérieures (...). Il n'existe pas d'engorgement massif des urgences.» Faux : depuis trois ou quatre jours les urgences en Ile-de-France débordent. Rien de rassurant.

11 août

La quasi-totalité des ministres étant en vacances, c'est Roselyne Bachelot, ministre de l'Ecologie, qui s'y colle, en organisant le 11 une conférence de presse dans l'urgence. Son message ? Un appel au «sens civique» des Français pour... qu'ils réduisent leur consommation d'énergie et utilisent leur voiture le moins possible. Pourquoi ? Pour éviter la pollution. A côté de la plaque. Ce même jour, devant l'ampleur d'une catastrophe annoncée, Raffarin dépêche Mattei au 20 heures de TF1. Nouveau faux pas. Depuis sa villégiature varoise, le ministre, en polo et détendu, fait une annonce fracassante : la mise en place d'un numéro vert pour informer les Français des mesures préventives.

Puis tout le monde retourne à sa torpeur. Les médecins sonnent toujours l'alarme. Le 13, le chiffre de 3 000 morts est évoqué. Le 14, le gouvernement déclenche enfin la mobilisation générale : «L'ampleur des chiffres peut surprendre», reconnaît Mattei. Avant de lâcher, sur un ton de défi : «Je n'ai aucun reproche, aucun regret.» Le même jour, Jacques Chirac fait savoir depuis sa cabane au Canada qu'il suit «précisément la situation». Et qu'il n'écourtera pas ses vacances.

Septembre

Copé privé de télé

1er septembre

La télé-réalité fait des ravages. Jusque dans les rangs ministériels. Le porte-parole du gouvernement a été choisi par TF1 comme premier invité d'une de ses émissions. Trente-six heures durant, Jean-François Copé devait s'exhiber dans le quotidien d'une famille bien française. Dominique Ambiel, le conseiller en communication de Raffarin, est séduit. Jacques Chirac beaucoup moins qui ne supporte plus que ses ministres se montrent dans des émissions de divertissement. Raffarin est alors obligé de rappeler Copé à l'ordre. Un Copé qui fait semblant de ne pas comprendre : «Il n'y a pas de désaccord de principe du Premier ministre.» Mais il renonce finalement et s'en sort par une pirouette : «Compte tenu de la tournure très polémique qu'ont prise les choses et qui empêche que la préparation d'un tel projet puisse se faire dans des conditions de sérénité suffisante, je n'y participerai pas.» Coup de pied de l'âne de Raffarin : «On n'a pas besoin d'être en pyjama pour exprimer ses convictions.» Voilà comment un ministre de la République n'accédera pas à la notoriété de Loana.

Raffarin fâche les «bureaux» européens

6 septembre

Européen convaincu, élevé au lait de la démocratie chrétienne, Raffarin a d'un coup livré une autre facette. Alors que Paris ferraille avec la Commission européenne pour s'affranchir des critères de Maastricht, le Premier ministre s'emporte : «Mon premier devoir, ce n'est pas d'aller rendre des équations comptables et de faire des problèmes de mathématiques pour que tel ou tel bureau dans tel ou tel pays soit satisfait.» Les «bureaux» bruxellois le prennent mal. Mais c'est son mentor, Valéry Giscard d'Estaing, qui le clouera au pilori : «Je souhaite que chacun se souvienne qu'il a des responsabilités nationales qu'il exerce dans le cadre européen. Les responsabilités nationales ne sont pas détachées du cadre européen.» Quant au ministre de l'Economie, Francis Mer, chargé de rendre des comptes à Bruxelles, il juge cette «expression peut-être un peu rapide».

La baisse des impôts fait monter le gazole

15 septembre

C'est la mesure qui brouille tout : une hausse de 2,5 centimes d'euro sur chaque litre de gazole pour les véhicules particuliers. Raffarin avait cru habile d'annoncer la mesure la plus controversée du budget 2004 au détour de la publication d'un plan «véhicules propres». C'est raté. L'opinion publique fait aussitôt la liaison avec la baisse de l'impôt sur le revenu décidée quelques jours avant.

Octobre

35 heures, «imbéciles» libéraux

5 octobre

Et un pas de clerc, un. Les 35 heures sont une véritable obsession pour les plus libéraux de la majorité. Leur faire un sort est leur objectif prioritaire. Le 2 octobre, Alain Lambert, le ministre du Budget, professe que sans elles les déficits publics seraient sous la barre des 3 % du PIB. Le feu vert est donné. Les libéraux proposent aussitôt la constitution d'une commission d'enquête pour tenter de prouver la nocivité des lois Aubry sur l'économie, de fustiger leur «application criminelle» et de les abroger. Tout cela sous l'oeil bienveillant de Raffarin ­ il a déjeuné avec les ultralibéraux peu auparavant ­ qui, en dégringolade dans les sondages, espère ainsi complaire à son électorat de droite. Mais Jacques Chirac veille. Il voit tous les risques d'une telle entreprise de démolition. Alors il fait donner son fidèle Jean-Louis Debré qui parle des 35 heures, le 5 octobre, comme d'un «acquis social». Fermez le ban. Le 15 octobre, devant un groupe de députés UMP, Chirac qualifie d'«imbécile» l'initiative des libéraux.

Fontaine «surmenée» du nucléaire

9 octobre.

Alors qu'on ne lui demandait rien, la ministre de l'Industrie en lâche une belle : la France s'achemine vers la construction d'un réacteur nucléaire de troisième génération EPR, annonce Nicole Fontaine. Pas du tout, rétorque Matignon, le lendemain, 9 octobre : «Aucune décision n'est arrêtée par le Premier ministre.» Surtout, devant le début de polémique, Raffarin ne veut d'un nouveau souci. Son entourage n'est pas loin de mettre ce «minicafouillage», comme il le qualifie, sur le compte du surmenage : «Nicole Fontaine travaille beaucoup, elle veut faire avancer ses dossiers, mais là, elle a été un peu trop vite.»

Fillon torpille la Pentecôte de Raffarin

28 octobre

C'est un des plus beaux pataquès du gouvernement. Pour compenser ses manquements durant la canicule, Raffarin a dans l'idée de supprimer le lundi férié de la Pentecôte pour en faire une journée de solidarité et ainsi financer l'aide aux personnes âgées. Avec pour arrière-pensée une tentative de réhabilitation de la «valeur travail». Hostile à cette idée difficile à mettre en oeuvre, son ministre des Affaires sociales, François Fillon, tente de la torpiller. Et fait «fuiter» l'information dans la presse. Grosse colère de Raffarin, puis marche arrière : ce n'est qu'une «hypothèse de travail», dit-il. Au terme d'une véritable enquête, le coupable de la fuite est retrouvé. Explication de gravure entre Raffarin et Fillon. Pendant ce temps-là, Alain Juppé suggère de consacrer à la solidarité un jour de RTT... Pour ajouter à la cacophonie, Nicole Fontaine, ministre de l'Industrie, y va de son idée de concours Lépine : pourquoi ne pas augmenter le prix du timbre pour financer l'aide aux personnes dépendantes ? Sa voix se perdra dans le désert.

Novembre

Avec ou sans Sonotone, Bachelot ne capte rien

19 novembre

A bon entendeur... Bachelot-la-gaffeuse régale une nouvelle fois. Chirac est-il dur de la feuille comme enfle la rumeur, et porte-t-il un appareil ? «Il me semble que oui», répond la ministre de l'Ecologie. L'Elysée ne l'entend pas de cette oreille, et envoie Jean-François Copé, le porte-parole du gouvernement, démentir sa collègue: un Sonotone ? «Il n'en porte évidemment pas.» Ca ne trompe personne. L'Elysée est donc obligée de confesser que oui, «peut-être» Chirac a-t-il «testé» un appareil auditif, un essai pas «concluant». Derrière cette belle cacophonie, une crainte : alors qu'il va vers son 71e anniversaire, enfle une polémique sur l'âge du capitaine. Pour couper court, on dit Chirac «dans la pleine capacité de ses moyens» ou «en pleine forme». Le malentendu est-il levé ?

Université : Ferry recalé

21 novembre

Un mouvement étudiant naît sur les campus. Le 20, l'Elysée fait savoir à Luc Ferry qu'il doit retirer son projet de loi sur l'autonomie des universités. Le lendemain, Ferry prend le contre-pied : «L'objectif de présenter le projet de loi en juin devant l'Assemblée nationale est maintenu.» Le surlendemain, marche arrière toute : un communiqué du ministère indique qu'«aucun projet de loi n'est inscrit au programme de travail du gouvernement, ni à l'agenda parlementaire». Mais Ferry indique qu'il veut travailler sur un «texte» «pour que, probablement d'ici au mois de mars par exemple, on puisse se mettre d'accord».

Décembre

Mattei prend en grippe les médecins

1er décembre

Comment se tirer une balle dans le pied. Pendant la canicule, le ministre de la Santé avait déjà mis en cause les médecins. Une catégorie professionnelle représentant l'un des pivots électoraux de la droite. Alors qu'une épidémie de grippe et de bronchiolite sévit, Jean-François Mattei peste contre l'inorganisation des permanences de cette médecine de ville qui, si elles étaient «correctement assurées», permettraient aux «services hospitaliers d'urgence» de «travailler dans de bien meilleures conditions». Stupeur dans les rangs des boucs émissaires. Quelques heures plus tard, le 1er décembre, le ministre passe la marche arrière : «Je n'ai pas voulu dire que les médecins de ville s'étaient désengagés», balbutie-t-il. On ne prend jamais à rebrousse-poil sa clientèle électorale...

Sarkozy «discriminé»

5 décembre

Il monte, il monte, le Sarkozy. Ne vient-il pas de déclarer publiquement qu'il pensait très fort à la présidentielle de 2007 et qu'il fallait se limiter à deux quinquennats présidentiels ? Il trace son sillon. Et sème ses idées. La République serait en panne d'intégration ? Il sort le concept de «discrimination positive» de son chapeau et promet même de nommer un «préfet musulman». Ah oui ? Non, tacle Chirac, en visite... en Tunisie. Ce 5 décembre, c'est de l'artillerie lourde contre le ministre de l'Intérieur : «Nommer des gens en fonction de leur origine», ce n'est «pas convenable», professe le Président. Ce retour à l'envoyeur permet aussi au chef de l'Etat de faire oublier sa propre gaffe de la veille quand il avait affirmé devant ses hôtes tunisiens que «le premier des droits de l'homme, c'est manger, être soigné, recevoir une éducation», provoquant le tollé des opposants au régime de Ben Ali. Depuis le fin fond de la Creuse, où il est en tournée, Nicolas Sarkozy réplique qu'il n'y a «aucune polémique». Et assure qu'il ne fera «aucun commentaire». Pas plus positif que négatif...

10 décembre

Il n'est pas que Jacques Chirac qui s'agace (c'est un euphémisme) de l'attitude de Sarkozy. François Fillon aussi. Le numéro 3 du gouvernement se dit «extrêmement choqué» de voir la succession de Chirac ouverte par le numéro 2. L'adversaire n'est-il pas à sa hauteur ? En tout cas, le ministre de l'Intérieur ne répondra pas lui-même mais enverra son fidèle Brice Hortefeux, conseiller régional d'Auvergne, batailler et accuser le ministre du Travail d'avoir tenu «des propos inutiles, agressifs et dangereux». Réponse de Fillon : «Qui est monsieur Hortefeux ? Je ne sais pas qui est monsieur Hortefeux.» Ce 10 décembre, à la sortie du Conseil des ministres, Sarkozy interpelle Fillon. «Ce n'est pas toi qui étais visé», jure le numéro 3. «Hortefeux, lui, c'était bien toi qu'il visait», réplique le numéro 2. Les choses vont mieux en le disant.

Libye : Villepin contredit MAM mal renseignée

22 décembre

C'est un cas d'école. A étudier dans tous les séminaires intitulés «couacs, bugs et pataquès». Les Etats-Unis, la Grande-Bretagne annoncent avoir contraint la Libye à désarmer après des négociations secrètes. Interrogée à brûle-pourpoint, la ministre de la Défense, Michèle Alliot-Marie, déclare le 21 avec une mâle assurance que, oui, la France «était parfaitement informée depuis des mois». Noooooooonnnnnnn, s'exclame moins de vingt-quatre heures après son collègue des Affaires étrangères. «Nous n'avons pas été tenus informés (...) de ces négociations menées en grand secret», se récrie Dominique de Villepin. Désarçonnée, MAM essaie de faire croire qu'«il n'y a pas de contradiction». Rire général. Alors, qui a raison ? L'Elysée tranche, c'est Villepin. Le porte-parole du gouvernement donne la véritable version vraie : «Les négociations avaient, chacun le sait, un caractère secret.» Le Château confirme : «Ces négociations ont été secrètes. La France, pas plus que d'autres, n'en a été informée.» Le lendemain, MAM va à Canossa : «S'agissant d'une question qui intéresse principalement la diplomatie, c'est bien la déclaration du ministre des Affaires étrangères qui fait foi.» Ouf, la face est sauve. Quoique...

C'est le dernier couac en date. Mais l'année n'est pas tout à fait finie...

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