Le site de Vix est avant tout célèbre pour la tombe de « la Dame de Vix », dont la fouille, menée en 1953, a révélé un mobilier d’une incomparable richesse. Soixante-six ans plus tard, une fouille programmée et dirigée par l'Inrap est de nouveau menée sur ce site emblématique du phénomène princier celtique.

Dernière modification
21 juillet 2021

66 ans après les fouilles menées par René Joffroy et Maurice Moisson, les archéologues réinvestissent ce terrain. Soutenues par la Drac, ces recherches sont menées sous la direction de l’Inrap en partenariat avec le Laboratoire artehis (cnrs/Université de Bourgogne- Franche-Comté). Prévues jusqu’à mi-novembre 2019, ces fouilles programmées visent à connaître l’environnement de cette découverte fabuleuse.

Vix, lieu de pouvoir

Le site englobe un promontoire dominant la Seine, fortifié par un vaste réseau de remparts. En son sommet s’implante un habitat, certainement siège de l’aristocratie locale. Il est composé de grands bâtiments absidés et de puissants greniers. La tombe est implantée en contrebas et à proximité du fleuve. Autrefois impressionnante butte de terre et de pierre marquant pour l’éternité la mémoire de « la Dame de Vix », le monument princier, mis en culture, ne constitue plus qu’un relief discret dans le paysage. L’association de la ville fortifiée, fouillée par Bruno Chaume (Cnrs), et d’une tombe princière permet de percevoir la butte du Mont Lassois comme le centre d’un important pôle de pouvoir contrôlant la vallée de la Seine.

La fouille de 1953

Durant l’hiver 1953, dans des conditions difficiles, la tombe de « la Dame de Vix » fut fouillée par René Joffroy. Dans la chambre funéraire, parementée de bois, les quatre roues d’un char étaient déposées le long d’une paroi. Au centre, une femme d’environ 40 ans reposait sur la caisse du char. Elle était richement parée avec notamment un torque en or, des fibules en bronze décorées d’or, de corail et d’ambre... Un gigantesque cratère grec en bronze – le plus grand vase métallique de l’antiquité – occupait un angle de la tombe. Il est décoré d’hoplites, de chevaux et de chars et des gorgones forment ses anses. Sont aussi présents une phiale (coupe) d’argent, une œnochoé, des bassins de bronze…
Cette tombe constitue en France la plus grande découverte celtique du XXe siècle mais le vaste monument funéraire qui l’abritait n’a jamais été réellement fouillé. Racheté par la Communauté de Communes du Pays Châtillonnais et classé au titre des monuments historiques, il    a fait l’objet, jusqu’en novembre 2019, d’une importante fouille visant à remettre en contexte cette extraordinaire découverte.

Réouverture d'une fouille ancienne

Les techniques d’enregistrement des données en usage en 1953 n’autorisaient qu’une prise en compte partielle de la tombe. Aucune vue d’ensemble, aucun relevé stratigraphique n’existent pour cet espace funéraire. Aujourd’hui, l’utilisation de drone, la photogrammétrie et la modélisation 3D sont autant de nouvelles technologies au service des archéologues.

De nombreuses questions restent en suspens, auxquelles l’équipe de spécialistes (archéologues, géomorphologues, céramologues etc…) ont tenté de répondre. Le monument funéraire abrite-t-il encore des sépultures secondaires ? Pourrait-on, comme l’a montré le site princier de Lavau, déceler les traces d’un podium destiné aux funérailles de la princesse ?

Découverte du monument funéraire

Les fouilles de 1953 n’avaient révélé que peu d'éléments du monument funéraire lui-même. Seules les prospections géophysiques récentes (réalisées dans le cadre du PCR « Vix et son environnement ») ont confirmé sa présence. Vaste tertre de 40 mètres de diamètre, il prend la forme d’un dôme de pierres et de terre. La présence de quelques assises révèle l’existence d’un véritable mur parementé en pierres liées à la terre qui atteignait un ou deux mètres. Bien qu’arasé, le monument laisse entrevoir une structuration interne inattendue : caissons parementés et lignes de pierres dressées rythment cet amas de matériaux dont l’histoire interne et l’architecture se révèlent complexes. Les pierres du tumulus, en calcaire, ne proviennent pas de l’environnement immédiat de la tombe, installée sur une terrasse de graviers formée par la Seine. Leur acheminement sur place, peut-être via la Seine elle-même, est manifeste et témoigne des moyens humains importants investis dans ce chantier colossal. Découverte inattendue de la campagne 2019, une maçonnerie quadrangulaire en gros blocs calcaire prend place contre le tumulus, face au mont Lassois. L’ensemble s’apparente à un podium dont la fonction reste à préciser (support de statuaire ?).

La présence de vastes aires d’extraction de matériaux comme celle de mobilier antique en surface du monument princier suggère que le tertre fut arasé dès cette époque. À la différence du monument princier de Lavau, détruit au cours du Moyen Âge, le tumulus de Vix aurait donc été détruit très tôt.

La chambre sépulcrale

Au centre du tertre, une couronne de gravier délimite l’emplacement de la chambre sépulcrale. Refouillée intégralement, elle présente une forme trapézoïdale avec des parois plutôt verticales et un fond plat atteint à 3 m sous la surface actuelle. Les remblais du creusement originel, rejetés en corolle autour de la tombe, sont scellés par les premiers niveaux du tumulus. Le plan émis par R. Joffroy à la suite de ses fouilles semble se vérifier, dans son orientation et ses proportions. Quelques traces fugaces des parois en bois ont pu être observées, mais plus aucun mobilier en place. La tranchée exploratoire de 1953 qui avait mené à la découverte a été retrouvée, côté ouest, et s’est révélée riche en matériel métallique et osseux, tout comme le remblai de la tombe elle-même. Ainsi, plusieurs centaines de restes métalliques et osseux sont pour l’heure comptabilisés. L’ensemble du sédiment issu des fouilles anciennes a été récolté pour être tamisé cette année. La découverte de l’unique fragment manquant à la frise figurative du cratère grec, celle de quatre fibules inédites (une en fer et trois en bronze, dont une miniature), ou encore des fragments d’os appartenant sans doute au squelette de la « princesse » sont quelques-uns des éléments découverts en 2019 qui viennent compléter le riche dossier de la tombe princière de Vix.

La campagne de 2019, dont les apports peuvent seulement être esquissés à ce stade, vient mettre fin à plusieurs décennies d’attente et de à propos des fouilles anciennes : elle apporte des données concrètes sur la qualité, l’histoire et le potentiel de ce monument aussi emblématique que méconnu.

Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Bourgogne-Franche-Comté)
Recherche archéologique : Inrap, umr artehis (ubfc, cnrs)
Responsable scientifique : Bastien Dubuis, Inrap/ artehis (ubfc, cnrs)