Cultiver des racines oubliées : le panais, le rutabaga et le topinambour

Publié le par Emmanuelle Saporta

Manger des racines ? Pourquoi pas. Surtout quand elles révèlent leurs saveurs oubliées ou méconnues. Voici trois légumes tout droits sortis de terre. À tirer de l'ombre, absolument.

Panais, rutabaga, topinambour... On les dit « immangeables, ringards, moches », mais ce qu'on oublie souvent d'ajouter, c'est qu'ils ont du goût! Un goût – ou plutôt des goûts – qui ne conviennent pas toujours à tous les palais, ou qui ne nous sont pas familiers, c'est vrai. Alors pourquoi ne pas faire un petit effort, et les tester à nouveau – ou pour la première fois ?

Profitez de l'hiver pour cuisiner panais, rutabagas, topinambours et autres légumes racines méconnus. Ils font leur apparition sur les étals des maraîchers et avec nos conseils, vous pourrez même vous lancer dans leur culture l'an prochain.

Le panais

On dirait une grosse carotte qui a oublié de bronzer. C'est l'arrivée de la pomme de terre qui lui a fait de l'ombre, alors qu'il était très apprécié en Europe, au Moyen-Âge et à la Renaissance. Depuis quelques années, il est de retour dans nos assiettes, apprécié pour sa saveur douce et sucrée. Son goût évoque à la fois celui du céleri et du fenouil. Certains lui trouvent plutôt une saveur de noisette ou de persil. Le panais est délicieux en purée, seul ou avec des carottes. Il apporte un parfum subtil au pot-au-feu. Essayez- le en gratin, poêlé, en frites - ou en chips, comme les Américains !

• Côté jardin : semez en avril-mai, en terre profonde, après avoir fait tremper les graines. Éclaircissez au bout d'un mois en laissant un plant tous les 15 cm. Binez régulièrement. Paillez pour maintenir le sol frais. Le panais aime le froid et sera bien meilleur après quelques coups de gel. Récolte d'août à mars.

Le rutabaga

Cette plante potagère, née d'un croisement du navet et du chou frisé, est en train de se refaire une réputation, même si elle a laissé à beaucoup de personnes le mauvais souvenir de l'aliment de base consommé en période de restriction alimentaire. Il est pourtant facile de le remettre au goût du jour avec quelques recettes inédites. Appréciez son goût unique, proche de celui du navet. Choisissez- le ni trop gros (parfois dur et piquant), ni trop petit (parfois creux). Cuisinez-le comme le navet, mais en doublant le temps de cuisson. Préparez-le en purée, seul ou avec d'autres légumes, en soupe, dans un pot-au-feu ou même dans un couscous de légumes anciens. Goûtez-le cru, râpé comme des crudités.

• Côté jardin : semez en pleine terre, d'avril à juin, dans un sol bien drainé, enrichi en fumure. Éclaircissez en laissant un plant tous les 25 cm. Bien arroser et désherber régulièrement. Récolte de septembre à mars.

Le topinambour

Lui aussi mérite une réhabilitation. Il n'est plus l'aliment de substitution consommé pendant la guerre, faute de pommes de terre, mais bien un « légume » à la saveur incomparable, mélange de noisette et de fond d'artichaut. C'est précisément le tubercule tout bosselé de cette plante vivace rhizomateuse que l'on consomme : cuit à la vapeur, sauté au beurre, en purée, en velouté ou en soufflé, mais aussi cru en salade et même en version sucrée. Essayez le cake aux topinambours, relevé d'épices (cannelle, gingembre) et de fruits secs.

• Côté jardin : plantez les tubercules en mars-avril, dans tout type de sol. Buttez les plants quand ils sont un peu développés, binez et paillez tout autour. Le goût des tubercules est plus prononcé s'ils restent longtemps en terre et prennent le gel.

Les topinambours se récolte d'octobre à mars.


Un topinambour qui s'épluche facilement


Avec ses tubercules allongés et dépourvus de bosses, ‘Sakhalinski Rouge' réduit la corvée d'épluchage à sa plus simple expression. Même en sol caillouteux, les racines de ce topinambour restent droites et non fourchues. Essayez-la pour vous réconcilier avec ce légume si injustement boudé. Et si vous craignez ses conséquences intestinales, mettez un peu de bicarbonate de soude dans l'eau de cuisson. Vous pouvez aussi l'essayer cru, râpé ou en nes tranches : son goût de noisette le fait servir sur la table de grands restaurants où l'on cache sa véritable identité…

La recette

Bricks de légumes anciens au cerfeuil

Préparation : 30 minutes.
Cuisson : 20 minutes.
Pour 4 personnes.

Ingrédients : 1 rutabaga • 2 panais • 1 topinambour • 150 g de beurre demi-sel • 1 botte de cerfeuil • 8 feuilles de brick • 2 yaourts bio nature • 5 cl d'huile de noisette • sel et poivre du moulin.

Préchauffez le four à 200 °C (th. 6-7). Pelez le rutabaga, les panais,
le topinambour et taillez-les en petits dés. Portez de l'eau salée à ébullition dans une casserole. Plongez les dés de légumes dedans pour 5 minutes. Égouttez-les, passez-les sous l'eau froide et séchez-les. • Laissez fondre 100 g de beurre dans une sauteuse et faites revenir les dés de légumes blanchis dedans, pendant 5 minutes environ. • Lavez, séchez et ciselez
le cerfeuil. Hors du feu, ajoutez la moitié du cerfeuil ciselé. Salez, poivrez et réservez. • Faites fondre le beurre restant dans une petite casserole.
À l'aide d'un pinceau, badigeonnez toutes les feuilles de brick de beurre.
• Empilez-les deux par deux et déposez un peu de farce de légumes au centre.
• Refermez les bricks sur la farce afin que rien ne s'en échappe. Disposez- les sur une plaque de cuisson recouverte de papier sulfurisé.
• Enfournez pour 7 à 10 minutes jusqu'à ce que les bricks soient dorés.
• Pendant ce temps, battez les yaourts avec l'huile de noisette.
• Salez, poivrez et ajoutez le reste du cerfeuil.
• Servez les bricks bien chauds avec la sauce au yaourt.

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